samedi 9 juillet 2016

Entretien avec Mammad Azizov (anarchiste azerbaïdjanais)

Que s’est-il passé le 9 mai à Bakou ?

Deux anarchistes d’Azerbaïdjan, Bayram Mammadov et Qiyas Ibrahimov ont fait des graffitis sur le mausolée de l’ancien président Heydar Aliyev, père du président actuel Ilham Haliyev. Le message était : « Les joyeux jours des esclaves ». Cette action eut lieu à la veille de l’anniversaire de Heydar Aliyev, le 10 mai 2016, qui est annuellement célébré par le gouvernement de manière ostentatoire et inutile. Dans un contexte de culte de la personnalité absolue de Aliyev, cet acte a été sévèrement condamné par le gouvernement. La police a dissimulé de la drogue sur Bayram et Qiyas afin d’éviter de les accuser uniquement pour hooliganisme. L’accusation de trafic de drogue est passible de douze ans de prison, selon la loi azerbaïdjanaise.
Ce n’est pas le premier sale tour du gouvernement d’Azerbaïdjan. Le gouvernement tente de faire croire au bonheur des citoyens, à la libéralité du système politique et ainsi anticipe toute menace contre son pouvoir absolu et ses conspirations. Il essaie de faire passer tous les militants politiques pour des toxicomanes ou des dealers, neutralisant toute action révolutionnaire avec des mensonges.
Il a exigé que Bayram et Qiyas présentent des excuses pour leurs actes devant des monuments de Heydar Aliyev et leur a fait subir des heures de torture... Tel est le message du gouvernement, mais nos camarades n’ont pas nié leurs actions. Ils doivent renier leur personnalité politique ou subir 12 ans d’emprisonnement et ils ont fait leur choix.
Ils ne sont pas les seuls, il y a jusqu’à 100 prisonniers politiques en Azerbaïdjan en ce moment.





Crédit image : Kédistan [note]

Quelle est la situation politique en Azerbaïdjan ?

En Azerbaïdjan, le gouvernement en place est répressif, auto centré et corrompu. Les autorités utilisent toute une gamme de fausses accusations pour incarcérer les auteurs de critiques contre le régime, y compris la possession de stupéfiants et d’armes à feu, le hooliganisme, l’incitation, et même la trahison. Le gouvernement se dirige de plus en plus vers la dictature. C’est un régime tyrannique.

Quelle est la situation économique en Azerbaïdjan ?

L’Azerbaïdjan dispose d’importantes réserves de pétrole au large des côtes de la mer Caspienne. Le contrôle de l’État sur les ressources pétrolières et la structure oligarchique de l’économie est une des raisons de la corruption généralisée en Azerbaïdjan. La famille Aliyev et leurs parents proches accroissent leur richesse personnelle, déjà significative, en puisant dans les ressources nationales du pays. En conséquence, les gens deviennent de plus en plus pauvres, alors que l’élite oligarchique exploite les ressources pour son propre profit.
Depuis que Bakou est fortement tributaire des exportations de pétrole et de gaz naturel, la chute des prix du pétrole a beaucoup affecté le pays. Comme toujours, les premières victimes sont les pauvres. Ceux qui souffrent sont les Azéris ordinaires à cause d’une dévaluation de leur salaire, des pensions etc. Après la dévaluation du Manat (monnaie nationale), les prix de tous les produits ont augmenté immédiatement, ce qui conduit à des protestations dans toutes les régions d’Azerbaïdjan. Et le gouvernement a utilisé sa puissance militaire pour les punir ...

Quels sont les besoins et les revendications de la jeunesse en Azerbaïdjan ?

Je ne peux pas répondre qu’à propos de la jeunesse puisque toutes les générations souffrent également de l’injustice et de l’inégalité en Azerbaïdjan.

Pourrait-tu nous parler rapidement de l’histoire du mouvement anarchiste en Azerbaïdjan ? Quand les premiers militants anarchistes sont-ils apparus ?

L’anarchisme est un petit mouvement politique minoritaire en Azerbaïdjan, mais il a des racines qui remontent au XIXe siècle. Les premiers anarchistes sont apparus en 1904 à Bakou. L’apogée de l’activisme anarchiste a eu lieu de 1906-1907. A l’époque, il a existé jusqu’à quarante organisations anarchistes en Azerbaïdjan, mais elles regroupaient peu de membres. Je peux nommer "Anarkhiya", "Borba" (Lutte), "Bunt ", "L’Internationale", "Sotnya Krasnaya" (Les Cent Rouge), " Les anarchistes individualistes ", "Black Crow", "Bombers Anarchistes", "Drapeau rouge", "Terreur", "Terre et liberté", "Azad" (libre).
En ce moment, il n’y a pas de groupes anarchistes réellement organisés en Azerbaïdjan, seulement des individus. Malgré ce manque de structures organisationnelles, l’idée de l’anarchisme se diffuse en Azerbaïdjan depuis quelques temps. L’émergence d’une nouvelle gauche dans les pays capitalistes centraux influence les pays périphériques, y compris les mouvements d’opposition en Azerbaïdjan. Cependant, la tradition et l’histoire du mouvement anarchiste sont également une base pour le développement de l’anarchisme en Azerbaïdjan.

Y a-t-il d’autres courants d’opposition en Azerbaïdjan ? Sont-ils concentrés dans les villes ou y en a-t-il partout ?

Il existe différents partis d’opposition en Azerbaïdjan, principalement concentrés à Bakou. Cependant, ils ont des membres et des organisations locales dans la plupart des régions. Mais les directions régionales de l’opposition traditionnelle ne sont pas très actives car il est très facile pour le gouvernement de les réprimer en province.

Comment l’opinion publique internationale peut agir pour protéger les militants azerbaïdjanais ?

Afin de montrer leur solidarité, les militants internationaux devraient interroger leurs autorités qui prétendent être démocratiques, mais qui en fait, ont de bonnes relations et affaires avec le gouvernement azerbaïdjanais.

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